Utiliser les techniques de mémoire pour la formation
Article paru dans le MagRH 18
L’ancrage des connaissances a toujours occupé une place centrale dans l’univers de la formation. En 1885, un certain Hermann Ebbinghaus réalise les premières études sur le sujet afin de comprendre comment optimiser l’acquisition des savoirs et maintenir ces connaissances dans le temps. Il formalise la courbe de l’oubli et met en évidence la perte importante d’informations au fil du temps : 60% de ce que nous apprenons est oublié en 3 jours. Pour lutter contre les effets de cette courbe, il est essentiel d’appliquer des piqûres de rappel de façon récurrente sur les connaissances non maîtrisées.
Pour faciliter l’ancrage des connaissances chez les apprenants, les départements formation doivent innover et repenser leur approche. En amont, l’identification des connaissances non maîtrisées doit être évaluée régulièrement et rapidement afin de permettre à chaque individu de disposer d’un environnement individualisé et adapté à son rythme d’apprentissage.
Les différentes typologies de mémoire
Le fonctionnement de notre mémoire est complexe et les derniers travaux de recherche autour des neurosciences nous ont permis de mieux comprendre les mécanismes de la mémoire. Les recherches sur la mémoire ont révélé qu’il existe 5 types de mémoires majeurs impliquant différents réseaux de neurones mais tous interconnectés. Etudier les spécificités de chacune de ces mémoires est un premier pas indispensable pour nous permettre de mieux comprendre comment nous pouvons faciliter l’acquisition de nouvelles connaissances.
Présentation des 5 types de mémoires majeurs
de notre cerveau :
Dès 1185, Hermann Ebbinghaus émet l’hypothèse que l’oubli suit une loi exponentielle en fonction du temps. La courbe d’Ebbinghaus représentée dans le schéma ci-dessous est une représentation graphique de la courbe de l’oubli. Nous pouvons remarquer que sans répétition, nous oublions près de 60% des informations que nous avons apprises au bout de seulement 3 jours.
Cependant, nous savons maintenant que cette courbe de l’oubli varie en fonction des conditions et dépend du contexte et du contenu à mémoriser. Plus le contenu est difficile, plus l’oubli est rapide. En synthèse, on peut retenir que la consolidation des savoirs s’effectue lors des répétitions, ceci provoque un effet de «réactivation des savoirs» au sein de notre mémoire.
Contextualiser les apprentissages. Les spécialistes de la mémoire se rejoignent sur un point : il est plus facile de mémoriser des informations qui ont du sens.
Pour favoriser l’empreinte mémorielle des contenus de formation, les responsables formation doivent donc adapter les parcours de formation aux enjeux métiers des apprenants. Cette contextualisation permettra aux apprenants de s’immerger rapidement dans les formations avec des mises en situation adaptées. Cette approche méthodologique permettra via des évaluations régulières de mettre en avant les notions non acquises et ainsi offrir à l’apprenant la possibilité d’optimiser son apprentissage et la mémorisation des parcours de formation.
Dès lors, les départements formation doivent être réactifs pour aligner la formation sur les objectifs du salarié en lien direct avec la stratégie de l’entreprise. Les directions formation doivent parvenir à résoudre cette problématique afin de pouvoir transformer les compétences en performance.
Derrière ce paradigme se cache une tendance de fond : donner du sens entre les actions de formation suivies par les apprenants et les objectifs individuels de chaque individu.
Un autre facteur clé du développement d’une mémoire à long terme est l’évaluation régulière des connaissances. Une étude menée par Stanislas Dehaene (Neuroscientifique au Collège de France), nous indique que si nous entraînons notre mémoire à récupérer des informations, celle-ci devient plus forte et nous arrivons à ressortir les informations de manière presque immédiate. Cette approche est souvent utilisée par les étudiants américains pour se préparer aux examens : «Flashcards». Il s’agit de cartes de révision où l’on écrit la question sur une face et la réponse sur l’autre.
Cependant, chaque individu ne dispose pas des mêmes capacités de mémoire. Il est donc essentiel pour les directions formation de tester et d’évaluer les connaissances des apprenants au travers d’une approche très individualisée. Ceci permettra de construire des parcours de formation prenant en compte le rythme d’apprentissage, les aptitudes, les acquis de connaissances et les besoins de chaque individu. L’apprenant pourra librement prendre différents chemins pour aller d’un point A à un point B.
Un autre élément à prendre en compte pour développer une mémoire à long terme est l’espacement des apprentissages. De nombreuses études montrent qu’à temps total constant, l’apprentissage distribué (connaissance que l’on répète après un certain délai) améliore la rétention en mémoire. Les travaux d’Hal Pashler tentent de déterminer quel est l’intervalle de temps le plus efficace entre deux répétitions. Ils montrent que cet optimum dépend de l’intervalle de rétention : si l’on souhaite maximiser les performances au bout de quelques jours, une répétition espacée de 24 h est optimale ; si cependant on souhaite que les connaissances soient préservées plusieurs mois ou plusieurs années, il faut allonger l’intervalle de répétition en proportion. L’effet est massif : une seule répétition d’une leçon, à un intervalle de quelques semaines, multiplie par trois les scores de mémoire quelques mois plus tard !
La consolidation de la mémoire lors des répétitions distribuées se base sur la “réactivation” de la mémoire lors de chaque répétition et par sa reconsolidation qui augmente la stabilité de la mémoire dans la durée.
C’est ainsi que le micro-learning s’impose, s’inspirant des techniques de mémorisation bien étudiées pour ancrer les connaissances. Ce format permet de mettre en contexte les apprentissages et d’allier mémoire visuelle et auditive. L’évaluation régulière permet d’ancrer les apprentissages et de les répéter lorsque cela est nécessaire. Dans cette optique, les plateformes de micro-learning peuvent être un atout précieux pour faciliter l’accès à des contenus éducatifs adaptés, favorisant ainsi une approche personnalisée de l’espacement des répétitions.
Plébiscité par un bon nombre d’organisations, le micro-learning serait souhaité par plus de 60% des DRH.
Nathalie Coustou